Nous proposons ainsi de développer un outil de pré-diagnostic, à utilisation autonome par le patient amputé, permettant d’avoir une idée de la rééducation nécessaire et de pouvoir faire des exercices en attendant d’être équipé. Une application “métier” à destination des amputés pourrait ainsi proposer : – un annuaire des centres de soin les plus proches, basé sur la géolocalisation et avec possibilité d’entrer en contact avec les centres accessibles, – un outil de reconnaissance d’image via photographie: le patient charge une photo de son moignon. Une reconnaissance d’image se lance avec une base de données médicale et un “pré-diagnostic” très simple est effectué. Sur cette base, un ensemble d’exercices est proposé au patient via des visuels simples, ne nécessitant pas de chargement lourd de données (pas de vidéo) – sur la base de ce pré-diagnostic, un rapport (photo) peut être envoyé au centre que le patient veut contacter, afin de constituer une première base pour la discussion avec le patient – une documentation simple (textes courts, dessins) est proposée au patient, sur la base de son pré-diagnostic – une messagerie interne pourrait être développée, pour la communication avec les centres de soin partenaires (en effet, dans les milieux très précaires, beaucoup de civils ne savent pas utiliser les emails). Il est également possible de tout simplement fournir des coordonnées whatsapp, cette application était extrêmement utilisée dans les pays en développement. L’amputation des membres, notamment inférieurs, peut être causée de manière directe par l’emploi d’armes destinées à mutiler (à l’image des mines antipersonnelles) ou suite à des blessures aux membres, qu’il n’est pas possible de prendre en charge faute de présence médicale ou de moyens nécessaires.
Mais l’amputation peut être également déclenchée de façon ‘’indirecte’’, lorsque des pathologies parfois pourtant très bien connues ne sont ni diagnostiquées, ni prises en charges ni soignées correctement… Le nombre de personnes amputées augmentant chaque jour dans les pays en développement ou en conflit. Le suivi statistique précis des cas d’amputations sur des périodes relativement longues dans des pays en développement montre que la première cause d’amputations est la survenue d’un ‘trauma’, d’une blessure ou d’un accident (plus de 50% des cas). Dans un contexte de guerre ou de grande précarité, l’amputation d’un membre est aggravée par la dépendance, l’insécurité et l’absence totale de moyens. Le monde médical et caritatif s’est évidemment intéressé à l’amputation. De grandes ONG à l’action mondiale interviennent en priorité sur le cas précis des amputés, à l’image de l’ONG française reconnue, Handicap International. De nombreux projets locaux existent également, offrant des prothèses à bas coût (et basse qualité) afin de tenter de répondre à l’énorme besoin sur le terrain. Equiper un amputé en prothèse peut être extrêmement coûteux ou très simple, selon la méthode utilisée. Dans le cadre de ce projet, nous nous intéressons en particulier aux contextes de précarité et d’insécurité car le besoin y est criant et grave. En Syrie seule, le nombre d’amputés augmente drastiquement chaque jour du fait des bombardements et des complications de blessures ou maladies chroniques non soignées, et l’action caritative ne peut possiblement rattraper ce nombre croissant. Des cliniques fournissant des prothèses de moyenne gamme, faites pour durer quelques années, ont vu le jour, notamment le National Syrian Project for Prosthetic Limbs. Cette association gérée par des médecins franco-européens a un double but : équiper le maximum d’amputés en prothèses, le plus rapidement possible, et former le maximum de prothésistes à ouvrir leurs propres centres. Entièrement gratuit pour le patient, les listes d’attentes sont longues mais les centres se sont développés au point d’équiper tous types d’amputations notamment des membres inférieurs, de poser des articulations (genoux), à des enfants très jeunes comme à des adultes, et le nombre de cliniques actuellement en fonctionnement dépasse une dizaine. Chez TKT, nous connaissons particulièrement bien ce projet que nous avons suivi depuis sa création en 2012-2013. Nous avons ainsi également identifié, aux côtés des équipes de prothésistes, un ensemble de besoins et de limites que l’on pourrait optimiser par le développement d’un outil digital. L’un des principaux problèmes générant coûts, listes d’attentes et mauvaise qualité des soins est en effet l’absence ou la quasi-absence de rééducation. Dans des contextes très précaires, à l’image du contexte des réfugiés syriens, la priorité absolue des organismes caritatifs de prise en charge reste la prise en charge de l’urgence, et à raison. Le plus important est ainsi de mettre tous les moyens disponibles au service de la pose du maximum de prothèses…. Peu de moyens sont donc alloués à la rééducation fonctionnelle, qui est pourtant essentielle à l’échelle individuelle. Ceci a plusieurs conséquences à l’échelle des cliniques spécialisées: – certains amputés arrivent après une attente parfois longue, et ne peuvent être équipés faute de rééducation nécessaire de leur moignon, avant pose de prothèse – d’autres sont équipés de prothèses et font une rééducation “à postériori”, par les mouvements quotidiens. Le moignon se développe alors et la prothèse devient vite non adaptée, et nécessite un changement rapide au bout de quelques mois. Ceci allonge les listes d’attentes de façon significative. A l’échelle individuelle, douleurs périphériques, qualité de vie impactée, autonomie réduite…sont autant de conséquences du manque de rééducation.